Justice et charité s'embrassent
Ce mardi 13 octobre, une cinquantaine d’agents et agentes de pastorale du diocèse de Montréal participent à une journée de ressourcement animée par l’équipe diocésaine de pastorale sociale sous le thème « Justice et charité s’embrassent ».
Ce mardi 13 octobre, une cinquantaine d’agents et agentes de pastorale du diocèse de Montréal participent à une journée de ressourcement animée par l’équipe diocésaine de pastorale sociale sous le thème « Justice et charité s’embrassent ». Tout débute par un « slam à J.-C. » très rythmé qui interpelle l’assemblée, dont voici quelques tirades : « Sortez de vos églises; il vous faut lâcher prise. Délaissez le parvis jusqu’en périphérie; là aussi est la vie. De toute ma Création, qu’en avez-vous donc fait? N’était-ce pas héritage prévu pour un partage, et non pour un carnage? Y a pas que les chrétiens qui peuvent être levains. Sachez vous associer au travail en chantier d’un monde à transformer1. » Le directeur de l’Office de la pastorale sociale, Brian McDonough, rappelle que « la justice sociale fait partie de l’annonce de l’Évangile qui est la mission de l’Église. L’engagement des chrétiens pour la justice, la dignité et le partage se réfère directement aux paroles et aux pratiques de Jésus et des prophètes ». C’est grâce à un engagement financier des paroisses, des communautés religieuses et du diocèse que l’Église lutte sur le terrain, avec les paroisses et les organisations du milieu, contre les injustices, les préjugés, les exclusions et l’appauvrissement.
Cette pastorale s’incarne aussi dans des activités en concertation avec des groupes sociaux sur la solidarité internationale sous l’égide de Développement et Paix. Elle est présente aussi auprès des personnes emprisonnées, des ex-détenus en vue d’une réinsertion sociale, dans le cadre de l’Aumônerie communautaire de Montréal2 fondée par Brian McDonough en 1995. Cercles de soutien inspirés des cercles de guérison chez les Autochtones, soirées-rencontres, Centre de jour René-Gagnon, rencontres détenus-victimes sont quelques-unes des activités offertes. La pastorale sociale est impliquée également dans des actions de solidarité avec les Autochtones et les travailleurs saisonniers agricoles3 par l'intermédiaire d'une table de concertation régionale. Elle a participé à une étude sur l’accueil et le parrainage des réfugiés et favorise l’engagement citoyen pour la protection de l’environnement4.
La pastorale sociale concerne tous les aspects de la vie en société, économie et politique incluses; elle invite les disciples de Jésus et les communautés paroissiales à mieux comprendre l’ampleur des enjeux de fond et leurs liens à l’Évangile, à y discerner l’Esprit déjà à l’œuvre et à y apporter leur grain de sel en paroles et en actes.
Le travail de recherche biblique, avec ses références suggérées aux participants de cette journée, illustre bien l’ancrage de cette pastorale dans les enjeux concrets qui interpellent nos sociétés : sécurité alimentaire (multiplication des pains et tradition du jubilé), immigration (« Ne pas exploiter l’étranger en résidence chez toi », Deutéronome 24), solidarité internationale (libération de l’esclavage), logement (« Ceux qui accumulent maison sur maison », Amos 3), écologie (respect de toute la création dont les animaux), pauvreté (« Il m’a envoyé porter la Bonne nouvelle aux pauvres », Isaïe 61, et « Le salaire dont les riches ont frustré les ouvriers », Jacques 5). La parole du prophète Isaïe sur la Bonne Nouvelle annoncée aux pauvres, toujours d’actualité, résumait bien l’esprit de cette journée.
« L’esprit du Seigneur Yahwé est sur moi, car il m’a donné l’onction; il m’a envoyé porter la bonne nouvelles aux pauvres, panser les cœurs meurtris, annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance… pour consoler tous les affligés, pour leur donner un diadème au lieu de cendre, de l’huile de joie au lieu d’un vêtement de deuil, un manteau de fête au lieu d’un esprit abattu… » (Isaïe 61, 1-3)Dans de grands centres urbains comme Montréal et Laval, les huit agents et agentes qui incarnent cette pastorale, avec un comité local porteur, se retrouvent de plein pied dans tous les enjeux sociaux identifiés. Quand on jette un coup d’œil sur leur feuille de route, on se rend compte qu’ils ont déjà marché sur ces sentiers. Ils ont de la boue sur les pieds. Conceptie Gervé, bachelière en science de l’éducation, a travaillé 25 ans en développement communautaire intégré en Haïti; Alessandra Santopadre a travaillé 8 ans à l’accueil des réfugiés dans quatre pays avec les Scalabriniens et est désormais en charge du programme de parrainage au diocèse de Montréal; Roger Bélisle, frère du Sacré-Cœur et ex-enseignant, a été intervenant en toxicomanie et en sécurité alimentaire; Michael di Girolamo, diacre, a fait des voyages de solidarité dans quatre pays et détient un maîtrise en santé et sécurité au travail; Alexandra Elena Cadar a une maîtrise en biochimie et s’est engagée dans les questions environnementales; François Godbout, agent depuis 13 ans, est diplômé en science politique de l'université McGill et de l’UQÀM et a participé à la fondation d’un syndicat en Mauricie; Martin Fontaine a été conseiller spirituel à l’action catholique et milite depuis 1998 dans des mouvements sociaux politiques pour la justice économique au Québec; Élodie Ekobena, bachelière en science politique de l’UQÀM, a vécu sur trois continents et s'est engagée avec la Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle (CLES); Anne Bourdon, assistante à la direction, a été 8 ans intervenante communautaire à Amiens et 8 ans au Service civile international en France. Alors que souffle sur l’Église catholique romaine un Vent de renouveau qui pousse vers l’extérieur, vers la périphérie, sur les sentiers du monde, et que le pasteur de Rome y invite aussi, il semble bien que l’Église de Montréal y a mis les pieds depuis belle lurette. Elle n’est pas la seule au Québec et ailleurs. Le grand défi demeure l’engagement avec confiance et audace des membres des paroisses.