Artisans de paix d’aujourd’hui
Nous trempons constamment dans des cultures de violence et le risque d’un conflit mondial n’est jamais loin, comme la situation au Moyen-Orient le démontre.
Nous trempons constamment dans des cultures de violence et le risque d’un conflit mondial n’est jamais loin, comme la situation au Moyen-Orient le démontre. Chez nous, depuis plusieurs années, c’est la militarisation de l’économie et des esprits qui bat son plein. Pouvons-nous y changer quelque chose? C’est ce défi qu’Antennes de Paix Montréal/Pax Christi a relevé. Cet organisme doit son existence à l’initiative d’une enseignante du Midi de la France, Marthe Dortel- Claudot, appuyée par Mgr Pierre-Marie Théas, évêque de Montauban (un des rares évêques à s’être opposé publiquement à la déportation des Juifs), dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale (1939-45). Cherchant la réconciliation et la paix sur les bases de la foi chrétienne catholique au départ, pas étonnant que Pax Christi ait pris racine d’abord en France et en Allemagne pour atteindre aujourd’hui une soixantaine de pays.
De passage à Toronto en 1988 pour visiter la section canadienne, Étienne de Joughe, secrétaire international de Pax Christi, souhaite la création d’une section francophone au Québec. Des « circonstances providentielles », selon l’expression de Gisèle Turcot, mettront en contact les trois fondateurs de la section montréalaise, soit elle-même, qui était alors à la revue Relations, Richard Renshaw, qui militait avec Développement et Paix, et Lise Barbeau, alors à la Conférence religieuse canadienne. Fondé à Montréal en 2007, Antennes de paix Montréal vise à promouvoir l’éducation à une culture de paix et de la réconciliation. « Nous partageons la vision d’un monde libéré de la violence, spécialement celle des armes. Solidaires des mouvements de lutte contre l’injustice, nous favorisons la résolution des conflits dans le respect des droits et de la dignité des personnes et des peuples1. » Pour réaliser ses objectifs, avec seulement quelques bénévoles, l’organisme Antennes de Paix fait la promotion de la reconnaissance de la dignité de l’autre, du dialogue et de la négociation. En lien avec des partenaires, il anime des ateliers thématiques dans le cadre de certains événements : congrès jeunesse d’Amnistie internationale, Forum social du Québec, colloques sur les minières, Commission Vérité et réconciliation. Il a organisé des soirées de réflexion et de débats sur des sujets comme : l’exclusion sociale résultant de la pauvreté, avec deux ONG de Montréal-Nord; le retour possible du Canada aux missions de paix dans le contexte international actuel; le nucléaire au Québec avec Alliance canadienne pour la paix et Artistes pour la paix; la justice environnementale. Antennes de Paix bénéficie des recherches de ses partenaires et appuie des campagnes internationales pour appliquer des traités, par exemple sur les bombes à sous-munitions (2008)2 et sur le commerce des armes conventionnelles (2013)3. Dernière initiative jusqu’à maintenant, la publication du livre Pacem in terris – paix sur la terre sous la direction de Gregory Baum. Cette encyclique de Jean XXIII (1963) constitue d’ailleurs la charte de Pax Christi. Un projet de recherche-action a aussi été mené sur la spiritualité et la théologie de la paix par Pax Christi en 2008-20104. La question du désarmement étant prioritaire à Pax Christi, c’est sur ce dossier que se situe sa plus grande expertise. C’est pourquoi, à l’invitation du Réseau canadien pour l’abolition des armes nucléaires, la présidente d’Antennes de paix Montréal, sœur Mary-Ellen Francœur, experte sur ces questions, a participé à un séminaire sur le rôle du Canada pour un monde sans armes nucléaires qui a eu lieu à Ottawa, le 31 mai 2013. Qu’est-ce qui peut bien entraîner quelqu’un à s’impliquer dans un si gigantesque, complexe et incertain chantier, soit celui de rétablir la paix entre les humains et leurs sociétés en allant aux racines des conflits? Pour Gisèle Turcot, le tournant fut la vision d’une scène de guerre à la télé pendant la guerre en ex-Yougoslavie. « J’ai vu plusieurs hommes armés dans des ruines et au centre une femme qui brassait un chaudron. C’est ça la guerre : l’enfer. Et je me suis demandé: qu’est-ce que je peux faire pour la paix? Ma deuxième question concernait "mon alliance avec les pauvres", car les injustices alimentent les conflits et la misère des pauvres conduit à la révolte. Les pauvres auront toujours besoin d’alliés. » Pacem in terris – Paix sur la terre, une invitation de Jean XXIII plus actuelle que jamais à nous compromettre pour la justice et la paix en solidarité avec les victimes et les artisans de paix.« Nous qui faisons partie d’Antennes de paix Montréal croyons que Dieu a un rêve pour l’humanité. Dieu veut un monde où règnent la justice et la paix. » Lise Barbeau, scsl, membre fondatrice