Annie et Jean-Luc : la force de voir l’avenir à deux...
Annie et Jean-Luc sont originaires de l’Abitibi.
Annie et Jean-Luc sont originaires de l’Abitibi. Ils ont vu naître leur amour il y a près de sept ans. Ils se sont fréquentés tout ce temps, tout en continuant à s’engager socialement chacun de leur côté – Annie avec quelques organismes d’éducation à la solidarité et Jean-Luc avec Ingénieurs sans frontières – et en complétant leurs études universitaires, à Montréal. Leurs fréquentations n’ont pas empêché Annie d’aller passer trois mois et demi en Chine. Ni Jean-Luc de partir cinq mois pour travailler bénévolement au Mali. Il y a moins d’un an, Annie et Jean-Luc revenaient d’un séjour de près de 18 mois en Haïti. Cette aventure, ils ont eu envie de la vivre à deux et ils en ont fait leur premier véritable projet de couple. Là-bas, aguerri par cette expérience riche et concentrée de vie commune, avec ses hauts et ses bas, Jean-Luc a fait la grande demande à Annie. Les cours de préparation au mariage, ils les ont suivis en Haïti même. De retour au pays, Annie et Jean-Luc se sont mariés en août dernier, voulant affirmer à la face du monde leur engagement l’un par rapport à l’autre, mais aussi par rapport à la construction d’un avenir meilleur pour l’humanité.
Leur séjour en Haïti n’a pas été étranger à leur décision. Aujourd’hui, Annie a 27 ans et Jean-Luc, 26. Malgré leur jeune âge, pourrait-on croire, ils continuent d’être de grands chercheurs de sens. Ce qu’ils font, ils le font avec intensité et profondeur. Intrigués, nous avons voulu les interroger au sujet de leur expérience de vie à deux ici comme ailleurs et de leur choix de se marier, aujourd’hui.
Sdf.info – Pour votre couple, que représente cette expérience de coopération en Haïti?
Annie – Quand on a écrit nos engagements pour le mariage, on voulait présenter les trois choses les plus importantes pour nous. La dernière ligne disait : « Avec toi, je veux contribuer à construire un monde meilleur. » C’était l’idée de construire quelque chose ensemble pour le mieux-être du monde. Cet élément de rayonnement est au cœur de ce que l’on veut vivre...
Jean-Luc – Pour beaucoup de gens, on était des voyageurs, des humanitaires. Ils avaient cette attente, et c’est ce qu’on a affirmé alors. On a voulu dire au monde : a) qu’on s’aime b) que c’est pour toujours c) qu’on veut surtout faire quelque chose avec ça.
Annie – On veut que notre amour serve à quelque chose dans le monde. Cet engagement-là, vécu en couple, fait que je suis capable de plus. Sur un plan individuel, oui je suis capable de m’engager, mais jamais aussi loin que lorsque Jean-Luc est avec moi. Je pense vraiment que ça m’amène plus loin. L’expérience en Haïti, je suis très heureuse de l’avoir vécue, mais je suis convaincue que je n’aurais pas été capable de la faire seule. On se l’est dit souvent : une chance qu’on est deux. Ce n’était pas que je n’étais pas capable concrètement, mais ensemble on avait davantage la capacité de passer à travers quelque chose d’aussi difficile, et de façon positive. On l’a vécu, et bien vécu, parce qu’on avait cette force-là.
Jean-Luc – Pendant notre séjour, en 2005, on a passé à travers plusieurs choses, il faut le dire. Des moments de stress côté politique et par rapport au projet d’eau potable sur lequel nous travaillions. Le fait d’être deux, puis de nous comprendre, nous permettait de mieux vivre.
Sdf.info – Quelle place a la spiritualité dans votre relation?
Annie – On est des personnes en quête de sens. On est toujours en train de se demander : ce qu’on fait, est-ce que cela a du sens? Ça fait sept ans qu’on se fréquente. Chaque année, on prend du temps ensemble, en vacances. Il y a toujours un moment où on finit par se retrouver devant un feu de camp, et se demander : ce qu’on a fait, cela a-t-il eu du sens, cette année? Puis : comment va-t-on faire pour que cela ait du sens aussi, l’année qui vient? On ne dit pas qu’on va prendre ce temps, mais on revient de nos vacances en se disant : on l’a encore fait! Ce besoin-là vient.
Sdf.info – Pour vous, qu’apporte de plus la vie en couple?
Annie – Les poètes disent : on est toujours tout seuls. En général, quand ça va mal, ce sentiment-là est accentué. On se sent d’autant plus seul. Je pense que l’expérience qu’on a vécue en Haïti, c’est que nous n’étions plus tout seuls. Plus ça allait mal, moins on se sentait seuls. Alors qu’on fait souvent l’expérience contraire dans la vie, en général. Quand tu réalises cela, ça change ta vision de l’avenir. Il n’y a plus grand-chose qui me fait peur. Dans le fond, je pense qu’on fait partie d’une minorité de gens, peut-être, qui ont l’impression de ne pas être tout seuls dans la vie. Il y a pourtant plein de gens en couple qu’on sent seuls. C’est apeurant.
Jean-Luc – Je fais une analogie avec la Guerre des étoiles. Les jedi ignorent la peur. La peur les empêche d’être eux-mêmes. On parle aussi de la force. La peur, c’est ce qui t’empêche de t’épanouir, d’aller plus loin. On est beaucoup plus confiants en nous qu’avant. C’est beaucoup parce qu’émotivement, on n’est plus seuls.
Annie – Ce que je réalise, et qui est vraiment bon, sain et fécond dans cette relation-là avec Jean-Luc, c’est que je n’ai pas l’impression qu’elle m’amène ailleurs. Elle m’amène à être d’autant plus connecté sur moi-même. Elle ne me transforme pas : elle me révèle! Pour nous, c’est clair. Le chemin que je prends dans ma vie me rend de plus en plus heureuse, autant sur le plan professionnel que personnel. Je me sens à l’aise et je sens que j’ai de l’espace pour faire mes choix et les assumer, même si ce ne sont pas les choix de la société. [...] Parce qu’on est ensemble, puis qu’on a cette force-là, ça me permet justement d’être vraiment moi, un peu envers et contre tous. S’il le faut bien sûr...
Sdf.info – Pourquoi choisir de vous marier?
Annie – C’est en Haïti qu’on a concrétisé notre décision de nous marier, mais ce n’est pas du jour au lendemain qu’on décide une chose pareille. Mais je pense qu’on a vécu quelque chose de tellement fort que l’on s’est dit : si on est capables de faire ça ensemble, et la personne que je deviens à ton contact, et la personne que tu deviens à mon contact, c’est ce qu’on veut pour l’avenir, alors allons-y. C’est ce que l’expérience d’Haïti nous a fait voir. On voulait continuer dans cette lignée-là.
Jean-Luc – On a choisi de se marier, d’abord parce qu’on a la foi tous les deux, c’est clair, même si c’est difficile d’expliquer en quoi. Si je parle de Jésus, on passe pour un couple catho. On croit en Dieu et en l’Amour. On croit aussi aux rites de passage. On a le sens du sacré. Puis moi, je pense que le volet « engagement public » est super important. Dans un mariage, quand il y a 150 personnes dans la salle, c’est 150 personnes qui, à mon sens, ont la responsabilité de nous aider à vivre un bon mariage. Et en plus, ça a été un véritable « pow-wow » d’amour!
Annie – C’était une recherche d’être accompagnés. On a demandé aux gens de prier pour nous. Chacun a écrit un souhait à notre égard. Ce geste a été très touchant. Des gens nous ont dit : « Moi, je suis très heureux de vous accompagner, de vous suivre dans votre vie... » [...] [Dans notre préparation], un moment, on s’est posé la question : Dieu, où est-il là-dedans? On a eu l’intuition qu’il y a un accompagnement de cet ordre aussi. On a parlé avec la personne qui allait bénir notre mariage. Ce qu’on en est venus à dire, c’est que Dieu, même si on ne le voit pas, passe d’une certaine façon. C’est à travers les gens qui sont là qu’on va le percevoir. On a commencé le mariage en disant aux gens : on veut que vous soyez cette présence-là pour nous. Quand Jean-Luc dit que ça a été un « pow-wow » d’amour, c’est vrai au sens strict. Il y avait quelque chose là-dedans qui était de l’ordre de l’extraordinaire...