Étonnante, la cohérence qui prend son origine dans l’enfance d’une vie.
Étonnante, la cohérence qui prend son origine dans l’enfance d’une vie. Combien de personnes pourraient raconter des moments de prime jeunesse qui les ont profondément marqués et ont modelé leur vie? Celle-ci s’appelle Lucie, ce qui veut dire lumière en latin. Et elle dit : « J’étais tellement bien de m’en aller vers cette lumière que je voulais m’y rendre »; « j’étais toujours en combat pour la vie, entre lumière et ténèbres. » Elle fait un peu penser à mère Teresa dont les écrits témoignent d’une noirceur quasi permanente chez cette femme dont les yeux étaient inondés de lumière. Et comme elle, Lucie trouve force, consolation et apaisement dans l’eucharistie. Ces ressemblances spirituelles sont le fait d’âmes qui sont travaillées de la même manière par l’Esprit, mais dont l’incarnation de la vocation se fait de manière différente. N’est-ce pas d’ailleurs en lisant un livre de mère Teresa qu’elle a « le coup de foudre » qui ouvre son chemin intérieur?
Formée par des prêtres ouverts
Quoi qu’on puisse dire du ministère ordonné réservé aux seuls hommes, il est bien clair, à la lecture de cet itinéraire, que Lucie Lumière est bel et bien une pasteure dans le plus beau sens du mot. Elle est formée de manière officieuse. Études en théologie comme tous les hommes qui veulent devenir prêtres. C’est aussi à leurs côtés que son cheminement se dessine de plus en plus clairement. Elle prie avec eux, discute avec eux, étudie avec eux. Comme souvent chez les femmes, c’est du côté de la coresponsabilité qu’elle peut découvrir davantage encore son être pasteur. Le nomme-t-elle ainsi à ce moment? Pas nécessairement. Mais c’est dans l’action et le regard d’hommes prêtres qu’elle peut pratiquer ce qu’elle deviendra de plus en plus. Il faudrait d’ailleurs saluer bien bas et bien plus souvent tous ces hommes prêtres qui ont reconnu l’appel des femmes et les ont soutenues de mille manières dans leur être pasteur. Invitant l’une à faire l’homélie, donnant à l’autre une responsabilité habituellement assumée par le prêtre, osant même cocélébrer des baptêmes et des mariages préparés par une femme. Ce sont des hommes de cette trempe qui ont fait avancer les choses jusqu’à ce que le courant froid venu de droite se réinstalle dans l’Église.
Des changements qui conduisent ailleurs
Mais pour Lucie Lumière, le chemin ne s’est pas terminé en cul-de-sac. Les Oblats l’avaient reconnue et lancée. Elle n’allait pas s’arrêter. Elle ne le pouvait pas non plus! Comment faire taire le Souffle saint qui l’habite? Une transition incertaine en paroisse survient. Transition non précisée. Cependant, le mot
transition donne à penser. Combien de fois a-t-on vu des changements dans un milieu se transformer en un chambardement de tout un travail qui s’était élaboré pendant des années. On ne sait pas ce qui s’est passé pour Lucie, mais une chose est certaine, elle a vécu dans une communauté qui avait le vent dans les voiles parce que le pasteur savait ouvrir grand les portes de la coresponsabilité. Jamais plus elle ne pourra vivre autrement que dans cet esprit.
Il est notable que de nombreuses femmes au cœur de pasteure se tournent ainsi vers des lieux d’engagement qui nécessitent un réel charisme. On dira peut-être : ce n’est pas surprenant, les femmes sont faites pour prendre soin... C’est avec un sourire en coin qu’on pourrait argumenter : justement, prendre soin, c’est la tâche du pasteur ou de la pastourelle!!!
Oui, étonnante est la cohérence qui prend son origine dans l’enfance d’une vie. Elle paraît encore plus cohérente, cette vie d’enfant de Lucie, qui a marché entre vie et mort. Qui a franchi le fleuve de cette vie-mort, mort-vie, pour finalement aboutir dans le lieu de la vie et de la mort qu’est le salon funéraire. Elle qui dit : « Ma vie trouve son sens : je choisis de dire oui à la vie, d’être moi. » Pouvait-elle être plus elle-même que dans ce lieu qu’elle connaît très bien? Oui, elle peut dire, Lucie Lumière, avec tous ceux et celles qui lui ressemblent : « Moi, Yahvé, je t’ai prise par la main, je t’ai destinée à être l’alliance du peuple et la lumière des nations pour faire sortir du cachot ceux qui habitent les ténèbres. » (D’après
Isaïe 42, 6)