« Dieu » dans les quêtes spirituelles de nos contemporains
Le thème de ces toutes premières Assises de la spiritualité était « Une spiritualité avec ou sans Dieu? » Organisé par Novalis, Médiaspaul, les Ministères en français de l’Église Unie du Canada, les Assomptionnistes, le Montmartre et la revue La Chair et le Souffle, l’événement a rassemblé près de 200 participants.
Le thème de ces toutes premières Assises de la spiritualité était « Une spiritualité avec ou sans Dieu? » Organisé par Novalis, Médiaspaul, les Ministères en français de l’Église Unie du Canada, les Assomptionnistes, le Montmartre et la revue La Chair et le Souffle, l’événement a rassemblé près de 200 participants.
C’est la théologienne protestante Lytta Basset qui a ouvert et conclu ces Assises avec une conférence en deux temps intitulée « "Dieu" dans les quêtes spirituelles de nos contemporains ». Les guillemets sont importants parce que plusieurs de nos contemporains, au lieu de parler de Dieu, préféreront dire qu’il y a quelque chose ou qu’ils croient en une force, une énergie. Basset elle-même parle du « Souffle d’Amour ». Nos contemporains ne veulent plus voir Dieu comme une notion figée ni un objet de connaissance : fini d’essayer de prouver l’existence de Dieu. Dieu est mouvement (Exode 3, 14 : « Je suis qui je serai »), un souffle en direction de la liberté, de la libération personnelle et collective. Dieu appelle chacun et chacune à sa propre liberté.
La question de Dieu est liée à plusieurs refus de nos contemporains : refus de l’inauthenticité, de l’argument d’autorité, du blabla religieux, de l’inadéquation paroles/gestes, du dogmatisme ecclésial, de grandir Dieu pour diminuer l’être humain… Basset croit que tous ces refus sont conformes aux textes bibliques (notamment Matthieu 23, 13 : « Vous barrez la route du Royaume aux autres alors que vous-mêmes n’y entrez pas »).
De nos jours, malheureusement, plusieurs représentations stériles de Dieu ont cours. Le Dieu sadique, le Dieu absurde, le Dieu indifférent, etc., mais la plus dommageable est probablement celle du Dieu impuissant. En fait, c’est l’idée de la toute-puissance de Dieu qui est fautive; elle n’est pas biblique, tout-puissant est une mauvaise traduction en français de l’hébreu Shaddaï. Le mot veut dire en fait celui qui dit « C’EST ASSEZ! », qui pose des limites. Lorsqu’on s’en prend à l’impuissance de Dieu, nous sommes comme des enfants qui voient leurs parents comme tout-puissants et leur en veulent de ne pas avoir été protégés par eux. Lorsque cela arrive, qu’on a le sentiment que ni Dieu ni nos parents ne sont venus à notre secours, c’est qu’il est temps de commencer à se défendre nous-mêmes. La colère est une formidable force et cette colère contre le Dieu impuissant doit nous amener à prendre conscience de la puissance de vie qui est en nous.
Alors, ce Dieu libéré de nos représentations stériles et d’accord avec nos nombreux refus, comment le connaît-on, où le trouve-t-on? Souvent, dans l’expérience de la transcendance, ces moments où nos semblables se sentent rejoints par la dimension de l’invisible, mais aussi, malheureusement, dans la souffrance. Quand Dieu semble complètement absent, il ne reste que les êtres humains pour refléter à la personne qui souffre que le Souffle la traverse. On passe ainsi d’un Dieu vertical à un Dieu qui se révèle dans l’horizontalité. Au plus profond de la souffrance humaine, Dieu est là. Mais Dieu est aussi dans l’expérience de la bienveillance : il suffit de rencontrer un seul être qui ait cette bonté inconditionnelle pour prendre conscience que c’est possible, que ça existe. Dieu ne nous veut que du bien, et son amour inconditionnel de tous les êtres humains passe par les êtres humains eux-mêmes. Pour Basset, on ne peut connaître Dieu que par son Souffle d’Amour qui souffle entre les humains et, pour les chrétiens, à travers Jésus Christ.
Alors, une spiritualité avec ou sans Dieu? Plutôt une spiritualité avec un Souffle d’Amour ou sans : comment vit-on avec les autres? Bien ou mal? Avec ou sans amour, traversé par le Souffle ou pas? C’est à ses fruits qu’on peut juger d’une spiritualité. Adorer le Père veut dire s’ouvrir à la source de tout amour et se laisser traverser par le Souffle. Nul besoin d’être croyant ou croyante, membre d’une Église ou d’une structure humaine; ce n’est pas interdit, mais Jésus nous dit que ce n’est pas essentiel. L’amour nous ouvre à l’Absolu, à l’immanence inépuisable.
Basset dit avoir beaucoup gagné à chercher Dieu dans l’horizontalité, beaucoup plus riche, plus complexe, jamais réductrice. Dieu n’est pas ailleurs, il est dans nos profondeurs.