Collégialité élargie et pensée critique en Église
Du 1er au 3 mai dernier se tenait à Québec le 2e Forum jeunesse organisé par la Commission permanente de la jeunesse de l’archidiocèse de Québec.
Du 1er au 3 mai dernier se tenait à Québec le 2e Forum jeunesse organisé par la Commission permanente de la jeunesse de l’archidiocèse de Québec. Sous le titre Des principes exigeants et des actions convaincantes : vers une présence chrétienne pertinente pour la vie du monde, une trentaine de groupes jeunesse du diocèse de Québec se sont rassemblés dans les locaux de Québec IXTHUS afin de prendre parole sur les défis et les enjeux auxquels ils font face et par lesquels ils se sentent interpellés. Une équipe d’observateurs et d’observatrices, extérieurs à la vie de l’Église de Québec, avait également été formée afin d’apporter un regard autre tant sur les procédures que sur les enjeux soulevés lors de cette rencontre. C’est à ce titre que j’ai participé à ce forum.
Le processus qui a mené à cette fin de semaine est intéressant en soi et s’est échelonné sur plusieurs mois. Ainsi, les groupes jeunesse de Québec ont été invités à formuler des propositions qui ont été compilées par la commission, une cinquantaine en tout. Ces propositions ont été renvoyées aux groupes afin de déterminer lesquelles étaient les plus populaires. Au final, douze propositions ont été retenues pour le Forum afin qu’elles soient débattues, approuvées et envoyées à l’archevêché de Québec. Voici quelques-unes de ces propositions qui illustrent bien les deux tendances présentes1 :
• Que les prises de position et les décisions de l’archevêque de Québec se prennent davantage en synodalité et en collégialité non seulement avec les évêques auxiliaires, mais aussi en une collégialité élargie avec les laïcs et les prêtres de l’archidiocèse de Québec;
• Que les enseignements offerts par les autorités diocésaines et les acteurs du diocèse lors de rassemblements jeunesses visent à développer une pensée critique et constructive tant à l’égard de l’Église que de la société plutôt que de simplement transmettre des dogmes;
• Que l’Église catholique de Québec fasse la promotion de messes plus interactives : que le prêtre qui célèbre ait un vocabulaire qui rejoigne les jeunes, qu’il manifeste une connaissance et une compréhension de ce qu’ils vivent et qu’il cherche à créer des liens avec eux; que la participation soit facilitée par des chants plus dynamiques, par exemple des chants Gospels traduits en français;
• Que l’Église catholique de Québec trouve une tribune et un langage pour que les positions de l'Église en matière de sexualité soient rendues accessibles et audibles pour les jeunes adultes.
Au Forum étaient présents des groupes issus autant de milieux conservateurs que progressistes. Une diversité de groupes, donc une diversité de couleurs et de positions. Tout au long des échanges et des débats, certaines caractéristiques et sensibilités se sont manifestées. Ainsi, la question identitaire dans une société pluraliste est apparue rapidement. Pour certains jeunes de milieux conservateurs, il fallait définir et clarifier ce que voulait dire être catholique alors qu’en contrepartie, d’autres groupes avançaient l’idée que la présence dans le monde, les actes, les paroles dites et les causes soutenues dévoilaient également le visage du Christ. Un autre sujet de débat concernait la question de l’annonce : explicite ou implicite? Pour certains jeunes progressistes, il était important de soutenir des centres jeunesse pratiquant une manière d’évangéliser « qui passe par les arts, favorise les rencontres, la réflexion, le dialogue et qui cherche à reconnaître Dieu là où il est déjà, dans la vie des jeunes et dans ce qui les fait vivre2 ». Cependant, certains jeunes se sont inquiétés d’une telle position en se demandant si de tels centres annonçaient vraiment Jésus Christ. Il fut aussi question de la place de la femme dans l’Église et de son accès au sacerdoce. Question reprise en plénière courageusement par un jeune après l’allocution du cardinal Ouellette.
À Québec, malgré les efforts du comité organisateur pour en faire un événement œcuménique, la grande majorité des participantes et participants étaient issus du milieu catholique et provenaient de la population québécoise dite « de souche ». Pourtant, le diocèse de Québec a une population très variée. Les propositions témoignent aussi de préoccupations très ecclésiocentriques, et pourtant le titre du forum laissait place à d’autres horizons. Qu’en est-il « des joies et des espoirs, des angoisses et des tristesses » du monde de ce temps et des enjeux de justice sociale? Une Église au service de qui?